L’histoire du pont de la Tournelle fait penser très fort au fameux sketch de la visite du château de Jacques Dufilho, dont la chapelle avait été entièrement, et plusieurs fois, détruite, brûlée et saccagée, mais que l’on visitait toujours. Le premier pont construit à cet endroit, ou du moins le premier dont on parle, le fut en bois, simple passerelle donc que les crues emportèrent bientôt. Le second, toujours en bois, fut emporté également quelques années plus tard, mais par les glaces cette fois. Comme on avait décidé de lotir l’île Saint Louis et que rien ne peut arrêter un bon projet immobilier, un pont sérieux devenait indispensable pour permettre à ses nouveaux habitants de gagner le quai saint bernard. Ce fut un certain Christophe Marie qui le rebâtit, en pierre cette fois. Six arches furent nécessaires pour résister aux flots tumultueux. Cela génait bien un peu la navigation fluviale, mais il résista mieux que ses précécesseurs, et il fallut attendre la crue de 1910 pour lui faire entendre raison. Le courant déchaîné lui infligea ce que les architectes nomment joliment des désordres. On dut le détruire en 1918 et on se résigna donc au béton. Les architectes, Pierre et Louis Guidetti, eureut le bon goût de le parer de pierres de taille et le sculpteur Paul landowski plaça sur son unique pile une statue de sainte Geneviève. Depuis, la patronne de Paris veille sur les destinées du pont de la Tournelle.
© gérard Laurent pour ParisCool, les photos de Paris